L’avant-match

Sur la composition de départ, peu de doutes subsistaient, notamment en défense. Navas au cage, le duo Ramos-Varane pour assurer sa garde et le soldat Marcelo sur le flanc gauche étaient des incontournables. La seule question qu’il était possible de se poser était qui pour occuper le côté droit en l’absence de Carvajal ?
Surtout que face au latéral choisi se trouvera Neymar, l’homme dangereux côté parisien.
Zizou avait le choix entre Nacho et le jeune Hakimi. Pour empêcher Neymar de repiquer dans l’axe le Real avait besoin d’un joueur explosif et bon dans les duels, quitte à un peu sacrifier le côté offensif.
Le choix s’est naturellement porté sur Nacho, joueur le plus rapide de l’effectif du Real (oui oui, vous ne rêvez pas, et c’est nos compères de Goal.com qui ont eu l’info, article disponible en cliquant ici

Au-delà du trio magique Casemiro-Kroos-Modric, l’autre question qui se posait pour ZZ était “442 losange avec Isco ou 433 avec Bale ?”.
Et l'entraîneur des Merengue a tranché en faveur de l’ancien Boquerones. Pourtant, vu le retour en forme du Gallois et la faiblesse bien connue du côté gauche de la défense parisienne, le choix paraissait plus que déstabilisant.

Mais le staff du Real a préféré appuyer sur un autre point faible, le manque de sentinelle. Motta est out, Diarra est encore juste physiquement, le Real mise donc sur un 8 repositionné côté Ville Lumière. Mettre Isco dans les pattes en misant sur une implosion du milieu parisien, en sachant qu’en plus du surnombre qu’il allait créer, le milieu aurait un ascendant psychologique certain depuis la rencontre Espagne-Italie.

Désorganiser complètement le PSG pour les forcer à défendre bas à cause des percées de balle et de la technique d’un électron libre au milieu, quitte à laisser Gareth Bale sur le banc, voilà une partie du plan de jeu du Real.

Le reste ?

On presse haut, à forte intensité. On ne cherche pas la possession mais on joue vers l’avant sans chercher la possession. On mise également côté Merengue sur le réveil de Ronaldo, qui a entamé une transition devenant, selon vos deux humbles serviteurs, le meilleur buteur du monde dans la surface, quittant cette image de joueur dribbleur technique qu’il était auparavant. Le Real va chercher à centrer en éclatant son milieu et en misant sur les qualités de Marcelo. Ce Real là, on l’a trop peu vu cette année, une seule fois à vrai dire, lors de la première mi-temps du Classico ...

1ere mi-temps

L'aspect défensif

Paris semblait vouloir forcer sur son côté gauche afin de toucher Neymar mais également éviter Ramos et Marcelo.

Une chose frappante dès l’entrée c’est la distribution des ballons de Mbappe. Le jeune français a distribué beaucoup plus à Neymar qu’à Cavani. Emery et ses hommes semblaient miser sur une faiblesse de Nacho, défenseur central repositionné latéral. Et cela aurait pu fonctionner à la perfection … Seulement les Merengue ont pu compter sur un des hommes forts de la soirée, Varane. Constamment présent pour défendre en tenaille, il lui suffisait d’attendre que Nacho défende et se projette sur Neymar pour que ce dernier pousse son ballon avec un dribble ou un crochet. Le français n’avait plus qu’à attendre le bon moment pour intervenir, ce qui a plutôt fonctionné pendant cette première mi-temps. Nacho a souvent été sur-sollicité, en dedans quelques fois mais au final, Neymar n’a pas vraiment apporté le danger.

Au milieu, Casemiro a retrouvé toute sa splendeur.
Chaque faute commise était intelligente : il coupait le jeu pendant la contre-attaque ou la construction avec une faute qui était assez forte pour couper mais sans jamais prendre un carton. Ses relances et son placement permettaient l’isolation de la ligne d’attaque parisienne avec son milieu (beaucoup de longs ballons passaient sur les côtés pour Mbappe et Neymar). Quand le milieu brésilien est comme ça, on sent le Real beaucoup plus serein, il équilibre à lui seul l’équipe et c’est sûrement ce qui a fait pencher plus tard la balance du côtés espagnol.

L'aspect offensif

A la fin du match, pour rire, la phrase “Kroos et Modric c’est carrément les frères Derrick” (deux protagonistes de la série Olive & Tom, ndlr) a été prononcée. Et au final, difficile de faire mieux comme phrase. Le Croate et l’Allemand ont développé une véritable symbiose, au point de sembler communiquer par télépathie. Les compensations sont incroyables, les couvertures d’Isco sont telles que l’espagnol a disposé d’une liberté offensive folle, ce qui a instauré une zizanie incroyable au sein du milieu parisien.

Paradoxalement, c’est ce même Isco qui a freiné les offensives du Real. En tentant le dribbles quasi-systématiquement, Benzema ou Marcelo ont été rarement servis à temps sur les ailes, et Ronaldo a reçu trop peu de centres pour s’exprimer.

Au final, aucun des camps n’a réellement voulu de la balle. Presque comme dans un city-stade, l’attaque-défense n’a pas cessée jusqu’au but de Rabiot. Dès lors, Mbappe et Neymar ont beaucoup plus collé leur couloir, les parisiens donnaient même l’impression d’évoluer en 451 avec un placement de Cavani bien plus bas.
C’est le déclencheur pour le Real, qui commencera à jouer avec des attaques placées, Isco ne ralentissant pas le jeu et Benzema bien moins discret dans son rôle d’attaquant d’appui qu’on lui connait habituellement.

La 2eme mi-temps

L'aspect défensif

A la sortie des vestiaires on retrouve un Real qui n’a plus la possession et un Paris qui se remet à jouer très vite. Le PSG se projette vers l’avant, avec des ailiers qui jouent très haut. La conséquence est simple : Isco se retrouve quasi-invisible, les ailes sont trouvées quasi-instantanément. La sortie  de Cavani a chamboulé la façon de défendre côté Merengue. La présence est moindre dans la surface, les défenseurs centraux peuvent monter au soutien des latéraux et c’est justement là que Ramos excelle. Paris a beau dominer ce premier quart-d’heure, nous n’avons jamais senti le Real fébrile. Alors est-ce l’expérience ? Les automatismes ? Ou juste le mental du Real ? Nous vous laissons juger.


 

L'aspect offensif

Tout change avec le coaching de Zidane, une véritable masterclass, il faut bien le souligner. Là où les changements d’Emery ont tardés voire n’ont pas eu d’impact, ceux de l'entraîneur français furent immédiats.
Passage en 442 à plat efficace dès sa mise-en-place, entrées de Bale à la place de Benzema puis double changement Casemiro/Asensio pour Isco/Vasquez.
Comme pour répondre à Unaï avec ses ailiers hauts à et ses latéraux qui dédoublent très peu.

Une stratégie vieille comme le monde, CR7 et Bale étant de très bons joueurs de tête, les deux jeunes espagnols entrants ont pour rôle d’éliminer puis de centrer au maximum avec comme objectif de forcer Neymar et Alves à défendre et de mettre Berchiche et Meunier sous pression constante.

On a beau dire “stratégie vieille comme le monde”, encore fallait-il l’appliquer au bon moment et Zizou mérite vraiment ses lauriers pour le coup. Un autre qui mérite des lauriers c’est bel et bien Ronaldo. Quoi qu’en en dise, loin de ses atouts de créateurs, il a fait le match que l’on attendait de lui : Une machine qui inscrit ses 100 et 101 eme buts en Ligue des Champions. Et sous cette statistique stratosphérique, il est bon de rappeler qu’un champion avec autant de longévité que lui ne peut conserver le même style de jeu toute sa carrière. Là où le portugais a perdu en qualité de dribble, il a gagné en expérience et en sang-froid. Impassible, sans trembler, il aura inscrit son doublé. Son (seulement) 4eme but en phase finale de Coupe d’Europe et un but que l’on peut qualifier d’un peu chanceux même si placement est irréprochable. Encore une fois, il prouve qu’il ne peut vivre que pour le but, et la question à se poser et plus “est-il possible de le critiquer tant qu’il marquera autant de buts décisifs dans cette compétition ?”.

La 3ème mi-temps

Pour sortir véritablement 3 artisans de la victoire madrilène, il ne faut pas chercher loin.
Le milieu d’abord, assez incroyable pendant le match avec un Casemiro qui nous sort son plus beau numéro de 6 impitoyable, accompagné de Kroos et de Modric, les deux artistes présents sur tous les fronts.
Marcelo également, le latéral brésilien était partout et encore, le mot est faible. Devant, derrière, en soutien des attaquants ou même attaquant, l’homme à la tignasse a paru imbattable alors qu’on le pensait prêt au changement après son accrochage en première mi-temps.
Enfin, Zizou et le jeune Asensio ont su déverrouiller la partie en déjouant la tactique parisienne. Les changements apporteront 2 buts, synonymes de fort avantage pour la qualification.

Une fois de plus, nous sommes entièrement d’accord sur un point : le Real est un club unique. Le plus gros vécu de ces 10 dernières années en Ligue des Champions, il arrive avec la tête haute malgré une saison qui ressemblait jusqu’à là à un petit cauchemar. Sa culture de l’Europe qui n’a pas d’équivalent en Europe (sauf l’ennemi Barcelonais), son sang-froid pour tuer le match … Tant que le Real garde ces qualités là, il semble favori, quelle que soit sa forme du moment.
En faisant le dos rond jusqu’au moment fatidique de tuer le match, Zizou a prouvé également qu’il était capable d’emmener encore une fois son équipe au bout, vers un back-to-back-to-back légendaire.

Alors oui, le Real ne propose pas le jeu tout en douceur de Naples, le champion du Monde 98 propose un jeu à l’ancienne, avec des centres répétés sur le buteur, une discipline défensive digne de son ex-coach Marcelo Lippi. Et ce Real là semble tellement fort qu’il parait dangereux même sans véritable tacticien à sa tête, avec un effectif incroyable dont au moins 6 ou 7 peuvent prétendre à un podium de meilleur joueur à son poste, et surtout des guerriers qui ont l’air taillés, à l’image du capitaine Ramos, pour les grands rendez-vous.

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Vous pouvez retrouver mon accolyte sur Twitter @QuaresmaSSJ20 (le pseudo résume le gars, c'est un incontournable)