Un tableau de chasse royal.

Nous ne parlerons pas de la première des 16 victoires, obtenue au Mondial 2015 dans une rencontre sans enjeu face à l'Uruguay (60-3), et ce avant que Stuart Lancaster ne soit écarté de son poste de sélectionneur.

Entre le Mondial 2015 et le Tournoi des Six Nations 2016, Eddie Jones ne disposait que de 4 mois pour entamer la reconstruction de cette équipe humiliée par la presse nationale, et en quête de nouveaux repères. Les observateurs sont plutôt sceptiques, mais Jones va profiter d'un calendrier plutôt favorable pour faire taire les critiques avec brio.
L'Angleterre s'impose d'abord à l'arraché en Ecosse (15-9), puis accélère en Italie (40-9), avant d'affronter, à Twickenham, les deux autres gros morceaux du Tournoi, l'Irlande et le Pays de Galles. Le XV du Trèfle se heurte à l'impitoyable défense de la Rose (21-10), tandis que les Gallois se réveillent trop tard (25-21). Après ce très beau parcours, Jones mène donc ses troupes aux portes du Grand Chelem, à condition de s'imposer au Stade de France. Incapables d'inscrire le moindre essai, les Bleus s'en remettent au pied de Machenaud (7 pénalités), mais craquent en défense, et laissent l'Angleterre s'envoler vers la première place (31-21).

Mais cette domination continentale ne suffit pas au grand public, et les Anglais ont encore tout à prouver lors de leur tournée d'été, prévue spécialement pour une revanche du Mondial, avec une rencontre face aux Gallois, et une tournée en Australie.Le XV du Poireau est de nouveau battu, sans trembler (27-13), mais le plus dur est encore à venir avec ce voyage en Océanie.                                                                                                                                                                                        L'Australie, vice-championne du monde en titre, ne compte pas se faire humilier sur ses terres. Mais les Anglais, emportés par une rage de vaincre destructrice, vont piétiner les Wallabies par trois fois. Un festival offensif pour débuter (39-28), une performance défensive hors du commun pour doubler la mise (23-7), puis une nouvelle démonstration en attaque pour conclure (44-40).

Eddie Jones n'a pas fait dans les sentiments face à ses compatriotes, et c'est toute l'Angleterre qui s'en frotte les mains, en attendant avec impatience les amicaux d'automne. Cette fois, pas question pour le XV de la Rose de quitter Twickenham, au moment de jouer l'Afrique du Sud, les Fidji, l'Argentine, puis une nouvelle fois l'Australie.                                                                                                                                                                                                                                                      Les Springboks ne sont qu'une mise en bouche pour l'Angleterre, écœurante de facilité (37-21). Les Fidji ne font guère illusion (58-15), tandis que l'Argentine résiste pendant 50 minutes avant de lâcher prise (27-14). Vient alors l'Australie, qui, après une première période de haute volée, ne tiendra pas la distance face à des Anglais déchaînés (37-21).

Le Tournoi des Six Nations, édition 2017, est clairement à la portée des Anglais. Pourtant, bon nombre d'observateurs s'obstinent à voir l'Irlande comme le candidat le plus sérieux à la première place, le XV du Trèfle ayant fait forte impression en mettant fin à la série des All-Blacks en novembre.                                                            Mais les premiers rendez-vous de la compétition vont permettre à l'équipe de Jones de redevenir le favori logique du Tournoi. L'Irlande chute d'entrée en Ecosse, alors que l'Angleterre, secouée par la France, s'en sort une nouvelle fois, en donnant une impression d'invincibilité renforcée par sa capacité à tenir dans les moments difficiles. Mais le déplacement périlleux qui suit, au Pays de Galles, constitue le vrai test de ce début d'année.                                                                             Le XV du Poireau ne compte pas céder à domicile, mais, au terme d'une rencontre époustouflante de rythme et d'intensité, ce sont encore les joueurs d'Eddie Jones qui l'emportent, avec un finish de folie (21-16). 

Une capacité d'adaptation phénoménale.

La force principale de cette sélection consiste à modifier son jeu en fonction de l'adversaire sans jamais renier ses propres principes. Ainsi, l'Angleterre, dominatrice ou dominée, donne toujours l'impression d'avoir le contrôle de la rencontre, ce qui n'est pas loin d'être le cas. Elle n'a jamais compté plus de 10 points de retard (ce qui n'est arrivé qu'une fois), et elle ne laisse jamais l'avantage bien longtemps à son adversaire.
Le XV de la Rose trouve aussi toujours le moyen de creuser l'écart sur une mi-temps, tantôt la première (16-0 contre les Gallois en mars 2016, 34-10 contre les Fidji en novembre 2016), tantôt la deuxième (29-0 contre l'Italie en février 2016, 17-0 contre le Pays de Galles en mai 2016, 13-0 contre l'Australie en juin 2016).

Pour débuter le Tournoi 2016 et son mandat de sélectionneur, avec un déplacement périlleux en Ecosse, Eddie Jones privilégie la défense, un choix logique au vu du potentiel offensif de leurs adversaires (Hogg, Laidlaw, Seymour), mais décrié par les spécialistes. Le XV de la Rose résistera aux attaques du Chardon pour l'emporter sur le fil (15-9).                                                                                                                                                                                                                                             Lors de la tournée en Australie, la deuxième rencontre s'annonce particulièrement physique. Les Wallabies sont vexés par leur première défaite, et comptent bien faire souffrir les Anglais. Une fois de plus, Jones mise tout sur la défense, afin de tenir tête à Hooper, Pocock et leurs partenaires. Le résultat est sans appel, l'Australie ne passe que 7 points devant son public, alors que le XV de la Rose en met 23.
Une semaine plus tard, le sélectionneur sait parfaitement que ses compatriotes vont chercher à se racheter offensivement, et décide de rentrer dans leur jeu plutôt que de répéter la même stratégie. Le but est alors d'inscrire plus de points que des Australiens déchaînés, ce que l'Angleterre, particulièrement inspirée en attaque, fera (44-40).

En ce début d'année 2017, Eddie Jones se découvre un nouvel atout : son banc. Les victoires sur la France et le Pays de Galles, au terme de rencontres particulièrement accrochées, sont en partie l'œuvre des remplaçants. Ben Te'o, entré en jeu par deux fois, en est le parfait représentant, avec un essai décisif contre les Bleus, puis 15 minutes de très grande qualité face aux Gallois, durant lesquelles l'Angleterre a définitivement repris les commandes de la rencontre.

Des individualités décisives.

Mike Brown (31 ans) est une référence au poste d'arrière. Très à l'aise sous les longs ballons, relanceur hors du commun, il se distingue par sa combativité exceptionnelle. Ses appuis ravageurs sont une véritable torture pour les défenses adverses, qui ont un mal fou à le contenir.
Longtemps dans l'ombre de Jonny Wilkinson, Owen Farrell (25 ans) s'affirme désormais pleinement comme un joueur de classe mondiale, qui éclabousse de son talent les rencontres de sa sélection. Il tourne à une très belle moyenne de 15 points par match depuis l'arrivée d'Eddie Jones, et parvient également à remplir les obligations de son nouveau poste de centre (3 essais).
Révélation du Tournoi 2015, Jonathan Joseph (25 ans) est le partenaire d'Owen Farrell au centre. Véritable chasseur d'essais, il en compte 8 sous l'ère Eddie Jones, dont un triplé en Italie, et des doublés contre les Fidji et l'Australie. Joueur aussi vif que puissant, il est désormais indiscutable en sélection.
Maro Itoje (22 ans), deuxième ligne au physique bestial (1 mètre 95, 115 kg) est l'une des nombreuses pépites de cette sélection. Intraitable en défense, intenable en attaque, il est le moteur du pack de la Rose.                                                                                                                                                                                            Dylan Hartley (30 ans), talonneur au caractère imprévisible, est le capitaine choisi par Eddie Jones. Capable du meilleur comme du pire, son mauvais comportement lui a souvent coûté très cher. Mais Jones a pour le moment réussi à le responsabiliser avec le capitanat, pour en faire un guerrier dans le respect des règles, et un admirable meneur d'hommes sur le terrain.

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