Le FC Lorient a eu chaud. A la trente-septième journée, sur la pelouse de la Beaujoire, un bol d'air frais est arrivé pour les Merlus, après un exercice irrespirable. Sauvant de peu sa peau en Ligue 1, les hommes de Sylvain Ripoll devront réagir et montrer un bien meilleur visage, afin de ne plus revivre les traumatismes d'une année passée éprouvante. Seizièmes du championnat, ceux-ci avaient montré d'énormes défauts, et beaucoup de fébrilité, surtout au niveau du jeu. Mais le FC Lorient pourra-t-il respirer cette saison ? Doit-il craindre le pire ?

Sylvain Ripoll, un premier exercice brouillon

Pour sa première saison en tant qu'entraîneur, il n'a pas connu beaucoup de tranquillité. Devant l'optique d'une catastrophe économique et sportive que serait une descente, il a constamment été mis sous pression. Cependant, bien qu'au final la seizième place n'était pas l'objectif escompté, il s'en est globalement bien sorti. Il s'est même permis une rupture avec l'ère-Gourcuff. Lors du match spectaculaire qui s'est terminé par une victoire à Marseille, Sylvain Ripoll a innové. Non pas parce que son équipe a, ce jour là, marqué cinq buts au champion d'Automne, mais bien parce que le 4-4-2 emblématique du club a été remplacé, au profit d'un 4-1-4-1.

Anecdotique peut-être. Ce ne serait que passager, pourrait-on se dire, afin d'acquérir une solidité défensive et une rigidité nécessaires pour rester dans l'élite. Mais non. Durant la préparation et tous les matchs amicaux, le 4-1-4-1 a été assidu, alors que le 4-4-2 lui, était absentéiste. Véritable personnage de l'épopée lorientaise, le 4-4-2, schéma "signature" de Christian Gourcuff, a été "trompé" par les tendances libertines d'un Sylvain Ripoll voulant "maîtriser deux ou trois systèmes". Permettant au club breton d'être plus fort défensivement, il a quelques inconvéniants. L'attaquant de pointe est esseulé, et ne peut pas forcément combiner avec les autres joueurs, très bas dans ce système. Mais surtout, le jeu lorientais étant fait de mouvement et de redoublements de passes, ce système ne permet pas spécialement son épanouissement. Le jeu à la lorientaise en serait-il ainsi renié ?

Ce n'est pas ce que veut affirmer Sylvain Ripoll. Mettant l'accent sur la solidité défensive lors de ses dernières sorties, il aborde régulièrement la question du jeu. En revanche, son système de jeu semble être taillé sur mesure pour Jordan Ayew...qui a quitté le club cet été.

Un mercato peu agité mais qui pourrait le devenir

Le mercato lorientais est pour le moment calme. Peu d'arrivées, peu de départs, mais un départ majeur. Auteur de douze buts la saison passée, et considéré pour beaucoup comme le sauveur du club, Jordan Ayew a filé à l'anglaise. Rejoignant son frère André dans les joueurs de Ligue 1 rejoignant des clubs moyens de Premier League, il a été au clash pour obtenir son dû, un départ. Transfert record du FC Lorient, il est surtout le fruit d'une belle plus-value et d'une belle affaire de Loïc Féry, président du club. En effet, si les bonnes stats sont là, elles paraîssent trompeuses. Sauvant par son individualité le club dans la fin de saison, il ne s'est jamais vraiment acclimaté au jeu breton, portant un peu trop le ballon. Son départ, si bien négocié, semble être un mal pour un bien, à condition que le remplaçant soit au rendez-vous.

Le remplaçant, là est l'autre problème du mercato breton. Très actif sur le dossier Jimmy Briand, Loïc Féry s'est fait couper l'herbe sous le pied. Celui-ci rejoignant l'En-Avant Guingamp, il a surtout mis en avant le problème d'attractivité des Morbihanais. Sur le dossier Briand, comme sur le dossier Benezet, le FC Lorient a perdu contre les costarmoricains. Et tandis que beaucoup de noms sont évoqués (Karl Toko, Benjamin Moukandjo, Djamel Bakar, Moustapha Yatabaré), aucun d'entre eux n'a encore signé de bail dans la ville aux cinq ports, le début du championnat étant imminent. Le FC Lorient manquerait-il d'attractivité ? Clairement ; en témoignent les nombreuses pistes qui font faux-bond. Les problèmes semblent pourtant évidents : le projet un peu flou, le synthétique refroidissant les joueurs fragiles, mais surtout les salaires, indexés sur les performances, avec un salaire fixe plus faible. De quoi refroidir les ardeurs de joueurs voulant une certaine sécurité financière et physique, et faisant perdre aux Merlus des pistes potentielles. Nicolas Benzet (EA Guingamp) a refusé le club morbihanais à cause du synthétique, qui plus est en mauvais état. De quoi inquiéter les supporters lorientais.

Deux recrues ont été effectuées, les jeunes Pape Paye et Moryké Fofana. Le premier, arrière droit de Ligue 2, semble tailler pour jouer la doublure d'un Lamine Gassama gronchon. Le deuxième étant lui plutôt taillé comme dynamiteur des défenses, avec des dribbles chaloupés et une grosse vitesse. Deux joueurs ayant encore tout à prouver. Les dirigeants bretons craignent également les départs de Lamine Gassama (Belgique ou Nice ?), Lamine Koné (Angleterre ?) et Raphaël Guerreiro (Porto, Paris, Barcelone, Arsenal ?), qui pourraient mettre en péril l'équilibre déjà faible d'une équipe aussi faible.

Un centre de formation prolifique

Si des recrues tardent à venir, certaines semblent déjà actées pour le groupe pro. En effet, depuis deux ans, le FC Lorient brille au tournoi U21 de Ploufragan. Premier l'année passée et troisième cette année, les lorientais possèdent un minier important de joueurs. Elu M.V.P du tournoi la saison passée, Mohamed Mara (photo ci-dessus) semble être un des tous meilleurs espoirs du club, au même titre que Denis Bouanga, J.P Kitenge, J.P Krasso, Marvin Gakpa ou encore le défenseur central Hamadou Karamoko. Ceux-ci étant capables de faire des apparitions chez les professionnels, leur fraîcheur et leur insouciance pourraient débloquer certaines rencontres.

Régis Le Bris, reponsable de la formation lorientaise, a même amené les lorientais jusqu'au titre de champions de France U17 la saison passée. Et avec un tel minier de jeunes, encore peut être immatures mais intéressants techniquement et physiquement, il serait un peu bête de se priver de les utiliser. Les recrues de demain, côté FCL, viennent peut être de là, tout comme sont issus du centre de formation lorientais les Lavigne, Lecomte ou Wachter, ayant bénéficié de temps de jeu en Ligue 1 cette saison.

Des lacunes encore présentes

Si les supporters avaient des doutes, ils ne risquent pas d'être rassurés par la mauvaise campagne de préparation des joueurs. Si "le groupe vit bien" selon Mehdi Mostefa, le groupe ne tourne pas encore bien. Les matchs amicaux étant souvent anecdotiques sur le plan comptable ou résultat, c'est la manière qui peut inquiéter. Avec deux buts en six matchs, le bilan du FCL inquiète. Manquant clairement de tranchant offensif et ne se créant que peu d'occasions, les hommes de Ripoll semblent voir revenir les vieux démons de l'an passé. Dans ce 4-1-4-1 défensif, il est compliqué pour les joueurs d'exprimer leur pleine capacité en phase offensive et Benjamin Jeannot se retrouve bien esseulé, là où la profondeur devrait être reine dans une équipe comme Lorient.

La défense, elle, est moins inquiétante. Malgré la blessure de Lamine Koné et la défense apathique contre le FC Nantes (1-4), celle-ci a montré quelques signes encourageants. Ne prenant pas de but à quelques reprises, le FC Lorient ne trouvera pas là l'essence de son succès, mais une roue de secours en cas de manque de créativité. Pouvant compter sur un gardien parmi les meilleurs la saison passée, les défenseurs sont plus sereins. Benjamin Lecomte devra réaliser une saison au moins aussi bonne que l'an passé, afin d'assurer les arrières lorientais. "Quand on ne peut pas gagner, on doit réussir à ne pas perdre" avait martelé de manière quasi-systématique le technicien breton.

Le facteur X : Walid Mesloub

Plus que tous les autres joueurs, la qualité de jeu de Lorient passe pas son meneur de jeu, Walid Mesloub. Véritable liant dans le jeu lorientais, il a fait coincider ses bonnes passes avec les bonnes passes de l'équipe, et inversement. Grâce à sa capacité à effacer des lignes en quelques dribbles, il permet à l'équipe de trouver de vrais décalages quand son niveau est optimal. Dans sa très belle période en fin d'année civile 2014, il a entraîné le collectif avec lui, et même sans marquer de but, il a été décisif. Derrière Marco Verratti, c'est le joueur ayant réussi le plus de passes la saison passée, et c'est surement le facteur le plus important de la réussite offensive de la ville aux cinq ports. S'il est à son meilleur niveau, de manière constante, nul doute que l'équipe fonctionnera de manière bien plus fluide. Cependant, s'il devait, comme en fin de saison, porter de manière abusive le ballon, il pourrait desservir au collectif.

Un FC Lorient poussé par des supporters motivés

Lors de cette dernière saison, le Moustoir a sonné parfois creux. Descendant parfois jusque 12.000 spectacteurs seulement en hiver, le stade n'a parfois pas soutenu l'équipe comme il aurait du. Mais si le stade est parfois apathique, l'association des Merlus Ultras 1995 fêtera ses vingt ans avant la trève hivernale. Mais l'anniversaire du groupe a commencé déjà lors des dix-neuf ans, avec une initiative encore inédite. Le groupe a pris la décision d'enchaîner vingt tifos consécutifs, retraçant la vie du groupe, sur vingt chapitres importants de l'association (le premier en photo ci-dessous : "Chapitre I : Le jour où l'avanture a commencé"). Un geste demandant beaucoup de travail pour un groupe indépendant, et fanatique de son club. Actif pendant la fin de saison avec un énorme déplacement à Nantes et quelques engins pyrotechniques, l'association a montré un soutien sans faille à l'équipe. Beau geste.

Quelle place pour le FC Lorient ?

Cette saison pour le FC Lorient est très importante. Gérant toujours l'après-Gourcuff en prônant la continuité, Loïc Féry se doit de montrer aux supporters qu'il a appris des erreurs qu'il a pu commettre. Ce dernier doit aussi bien utiliser l'argent du transfert de Jordan Ayew, car son remplaçant sera scruté tout comme le Ghanéen l'a été pour l'après Aboubakar. Pour le technicien breton, c'est également l'occasion de confirmer sa première saison. Parvenant à maintenir le bateau Lorientais dans l'élite, il se doit de continuer ainsi, en faisant progresser l'équipe jour après jour, comme il l'a fait en fin de saison.

Si le top 10 visé par Loïc Féry semble, dans l'état actuel des choses, irréalisable, il pourrait le devenir en cas de recrutement intelligent (un ou deux attaquants, un défenseur et un milieu expérimenté). Pour le moment, le club morbihanais vise le maintien, et ce n'est pas encore chose acquise, loin de là.

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