Le jour de gloire de Thomas Voeckler

Thomas Voeckler se présente au départ du Tour de France 2004, son deuxième, tout fraichement auréolé de son titre de champion de France. Il arrive donc en bonne forme car il a aussi remporté une étape sur la Route du Sud. Le début du Tour est usant et crée des écarts car les coureurs empruntent les pavés de l’enfer du nord. Au départ de la 5e étape qui relie Cambrai à Arras, Lance Armstrong est en tête du classement général. Une étape qui se prête à un sprint massif. Cinq coureurs prennent la fuite dont Thomas Voeckler. Il est accompagné d’O’Grady, Piil, Casar et Backsted. Le vent et la pluie allaient faire les affaires des échappées. En effet, les chutes déciment la moitié des coureurs de l’US Postal et par conséquent l’écart augmentent. L’équipe de Lance Armstrong ne veut prendre aucun risque et finit tranquillement l’étape en menant le peloton. Les 5 hommes se disputent la victoire. À ce petit jeu, Stuart O’Grady, le plus rapide de l’échappée, offre la victoire à sa formation française de la Cofidis. Thomas Voeckler qui était pointé à 3 minutes le matin, savait qu’il était le mieux placé et endosse le maillot jaune sur le podium. Il offre un magnifique cadeau à Jean-René Berneaudau le jour de ses 48 ans. Il accuse une avance de presque 10 minutes sur Armstrong au général qui sera déclassé par la suite pour dopage.

10 jours en jaune

L’objectif de la formation Vendéenne était de garder le maillot jusqu’aux Pyrénées. Un objectif qui va être de très loin dépassé puisqu’ils le conserveront jusqu’aux Alpes et Villars de Lans où Armstrong reprend la tête. Mais pendant la traversée des Pyrénées, Voeckler a été héroïque. Il ne se laisse pas impressionner par les grands du peloton. Imposant ses règles avec son équipe aux échappées. Tout le monde se souvient de cette fameuse étape arrivant à la Mongie. C’est sûrement à ce moment qu’il a conquis le cœur de français. L’US Postal qui a assez laissé faire « ty-blanc » jusque là prend les choses en main et impose un énorme tempo en tête de peloton. Voeckler est rapidement lâché comme Ullrich et Hamilton. Dans sa mésaventure, Voeckler se retrouve avec un compagnon d’infortune, l’autre chouchou des français, Richard Virenque. Le grimpeur, qui portait le maillot à pois à ce moment, va prendre Thomas sous son aile, lui parler, l’encourager et lui faire le tempo pour qu’il perde le moins de temps possible sur Lance Armstrong alors qu’ils n’étaient pas dans la même équipe. Sans le savoir, on assistait à une passation de témoin entre deux générations puisque Virenque prenait sa retraite à l’issue de la saison et Voeckler allait devenir de plus en plus un acteur incontournable du Tour. À l’arrivée, le débour est de 4 minutes mais le plus important c’est qu’il porte toujours le maillot jaune.

Voeckler héroïque au Plateau de Beille

Le lendemain c’est l’étape du Plateau de Beille avec 7 cols répertoriés. Voeckler a 5'24'' d’avance sur Armstrong. Il est lâché à 14 kilomètres de l’arrivée. Seul cette fois mais soutenu par son directeur sportif qui l’encourage à côté de lui dans la voiture, il parvient tout de même à conserver son maillot jaune pour 22 petites secondes. Avec cette image mythique en franchissant la ligne de Voeckler le poing levé, heureux de conserver le maillot de leader. Chaque jour supplémentaire en jaune pour lui est comme une victoire. La perte du maillot interviendra un jour plus tard à Villars de Lans. Il savait pertinemment qu’avec 22 secondes qu'il ne conserverait pas le maillot. Il arrive avec 9 minutes de retard mais ne retrouve pas son maillot bleu blanc rouge pour autant puisqu’il endosse le maillot blanc de meilleur jeune. Maillot qu’il perdra à l’issue du dernier contre-la-montre à Besançon, la veille de l'arrivée aux Champs-Elysées, au profit de Vladimir Karpets. Les deux chronos dans les 5 derniers jours lui auront été fatals prenant à chaque fois un éclat dans un exercice qui est peut-être le domaine dans lequel il est le moins bon. Mais qu’importe, ce tour-là Voeckler a écrit sa légende en gardant 10 jours un maillot jaune qui lui est tombé dessus un peu par hasard. Ce Tour-là, les Français ont découvert le style Voeckler, langue tirée, maillot ouvert, grimaces et un déhanché qui donnerait l’impression qu’il pédale avec les oreilles dans une période sombre du cyclisme gangréné par les affaires de dopage. Gagnant le respect des chefs du peloton dont Armstrong, ce qui n’était pas chose facile. Un style qui les fera vibrer désormais jusqu’à sa fin de carrière.

- Les 12 travaux de Thomas Voeckler (1/12) : Championnat de France 2004